Cheb Hasni <3
Cheb Hasni, de son vrai nom Hasni Chekroun est né le 1er février 1968 à Oran. Après une enfance dans un milieu modeste, il intègre le CEM Kabbati où il montra un goût prononcé pour l'école buissonnière. « Le marmot » n'avait rien d'un bûcheur. Ce qui le mettait dans tous ses états, c'était courir derrière un ballon de football ou donner libre cours à sa voix dans des concerts qu'il improvisait avec ses camarades de quartier ou à la plage des Genêts.
Titillé par le démon du jeu à Onze, il intégra l'équipe des minimes de l'ASMO. Ceux qui l'avaient connu à cette époque retiennent de lui l'image d'un demi-offensif accrocheur, gagneur. Teigneux, diront certains. Il n'hésitait pas à écorcher le tibia d'un adversaire un peu véloce.C'est vrai qu'il était difficile de se frayer un chemin quand la scène est occupée par des ténors qui avaient pour nom, Bellemou, Bouteldja Belkacem, Khaled ou Zahouania. C'étaient les vedettes de la chanson raï qui commençait à casser le ghetto dans lequel elle était enfermée. De mariage en mariage et d'anniversaire en surboum, il finit par se faire connaître par un producteur de cassettes qui lui proposera des essais. Et c'est parti. C'est une carrière qui commence. Le jeune Hasni, qui jouait au muezzin pour appeler à la prière dans son quartier de Gambetta, troque son kamis immaculé contre stress et paillettes.
C'est la gloire qui est au rendez-vous. On commence à s'arracher ses cassettes, on le sollicite pour animer des mariages, il fait une entrée triomphale dans les cabarets de la corniche. La Guinguette, le Casino, Beau Séjour, des haltes repères dans la vie de Hasni. La chanson rai sortait grandie en 1986 du festival national de la jeunesse. Khaled, Mami et Zahouania étaient les étoiles qui avaient illuminé le ciel de Riadh El Feth durant les chaudes nuits des mois de juillet.
Hasni profitera de cette dynamique pour interpréter un duo avec la diva du raï, cheba Zahouania Baraka m'raneka, un lamento fait de mots crus qui écorchent les oreilles chastes. Sur un plan commercial, le producteur s'en mettra plein les poches, mais Hasni dira de cette cassette que c'est un bide et qu'il ne referait jamais le coup des mots décapants. Il revoit son lexique pour préparer un répertoire BCBG et s'inscrit désormais dans le style raï sentimental, des complaintes à l'eau de rose pour plaire à un public devenu nombreux. Les producteurs de cassettes, flairant le bon filon, lui feront mener un train d'enfer. Il enregistrait jusqu'à trois cassettes par jour pour des producteurs différents. Il était prolixe et voulait en donner plein les tympans à ses admirateurs.
Le 29 septembre 1994, à midi pile au quartier de Gambetta, Hasni, adossé à un poteau électrique, devisait joyeusement avec ses amis. Il guettait comme d'habitude le passage des filles du lycée Hamou-Boutlelis pour signer quelques autographes et taquiner quelques admiratrices. Au moment où il s'apprêtait à prendre une gorgée de café de la tasse qu'il tenait à la main, un jeune homme, le crâne rasé, bien habillé, emmitouflé dans une jacquette l'appelle.
Croyant qu'il s'agissait d'un admirateur, il se détache de ses amis pour aller à sa rencontre, le jeune homme le prend par l'épaule et sans dire un mot, lui plaque le canon d'une « mahchoucha » sur le cou puis tire par deux fois avant de prendre la fuite. Hasni s'écroule. Son agresseur s'engouffre dans une Renault 12 qui l'attendait à quelques mètres du lieu du crime. Ils étaient trois dans le véhicule. Ils seront abattus quelques mois plus tard. Hasni succombera au cours de son transfert à l'hôpital. Au palais de la Culture d'Oran, le public réuni dans la salle pour assister à un gala organisé par l'association Echourouk piaffait d'impatience. L'animateur monte sur scène avec un air grave. Il prend le micro pour annoncer que la manifestation est annulée en raison de l'assassinat de cheb Hasni. Tout Oran envahit Gambetta.
Il avait chanté l'amour, la jeunesse, l'espoir, la patrie. Porte-parole d'une jeunesse qui n'a pas abdiqué, il continue de lui donner courage et de lui susurrer à l'oreille, dans ses moments de faiblesse, Mazale kayene l'espoir, Ouahlach tagtaoû lyâs (Il y a encore de l'espoir, pourquoi sombrer dans l'abattement)
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